Et si le télétravail nous aidait à passer à autre chose ?

Covid 19 et ses variants : La situation s’éternise sans que l’horizon ne s’éclaircisse. Lassitude, inquiétude et stress face à l’avenir, le cocktail est en soi redoutable. Et le télétravail dans tout cela ?

Zoom, Teams, Cisco Webex, et même Mural, tout le monde sature.

A cela s’ajoute, en raison du télétravail, l’isolement,  l’impossibilité de se retrouver pour se nourrir des relations interpersonnelles spontanées (autour de la machine à café, en se croisant dans les couloirs) et d’une dynamique d’équipe.

Les réunions à distance ne parviennent pas à pallier à ce manque de lien et deviennent même source de fatigue supplémentaire et de stress, pour plusieurs raisons : attention accrue pour compenser l’absence de signaux corporels, malaise lié au fait de se trouver confronté en permanence avec l’image que l’on donne de soi, perturbations techniques.

In fine, la crise met à mal les liens, la dynamique collective et le sentiment d’appartenance à un collectif, à tout ce qui nous fait humain.

Quelles parades ?

Rapidement confrontées à ces difficultés, les entreprises et leurs collaborateurs ont innové et trouvé des palliatifs.

Plus que des parades, des palliatifs

Les 16 et 18 mars dernier, Manageris organisait des webinaires pour partager les expériences réalisées par les entreprises pour recréer du lien et entretenir une dynamique d’équipe malgré la distance.

illustration de Catherine Créhange pour Managéris

On y découvre de nombreuses initiatives consistant :

Pour introduire un peu de chaleur humaine dans les relations :

 à organiser des moments de convivialité avec les presque traditionnels aperoZoom et une variante : « les cafés aléatoires » regroupant quelques personnes tirées au hasard parmi les volontaires inscrits.

Icebreakers : les matinales de Kalaapa

Au titre des moments de convivialité, les « icebreakers » de Kalaapa, « concentrés de bonne humeur et de créativité » animés par Arnaud Pottier Rossi méritent une mention spéciale. Maîtrise de l’outil (MURAL), qualité de l’animation, chaleur de l’ambiance, créativité, émergence de l’intelligence collective, ces matinales tiennent leur promesse : « Vous repartez avec une sacrée dose d’énergie pour la journée ». Vous retrouvez ces matinales (tenues chaque mardi jusqu’au 13 juillet 2021) en vidéo et pouvez également vous y inscrire ici (c’est gratuit!).

Pour donner à vivre le sentiment de faire partie d’un collectif  :

à assurer une prise de parole des dirigeants focalisée sur les informations essentielles concernant tout le monde

Pour donner des occasions de travailler ensemble sur un sujet fédérateur.

à créer des groupes de travail ou des communautés ayant pour objet des réalisations précises.

Pour donner des perspectives positives :

à impulser des échanges au sein des équipes afin de débattre des meilleures façons de travailler, une fois les contraintes sanitaires passées.

Sans oublier l’éternel « deus ex machina »: la formation des managers !

Comme pour tout problème ou serpent de mer, la solution miracle a censée faire merveille est réapparue : former les managers. Les former à l’entretien du lien, à l’écoute, aux risques psychosociaux et tutti quanti. Certes les accompagner est plus que nécessaire, mais n’oublions pas que les managers, en première ligne, sont, de ce fait, les moins disponibles et, placés entre le marteau et l’enclume, les plus vulnérables. N’oublions pas que les outils et la technique ne peuvent résoudre la détresse humaine !

On y trouve néanmoins une piste plus prometteuse que la simple formation car elle s’appuie sur les ressources propres aux managers, en fait les acteurs de leur résilience : une entreprise a initié un atelier de partage d’expérience entre jeunes managers à potentiel sur la manière de gérer le télétravail (accessoirement il en est ressorti 10 bonnes pratiques partagées ensuite avec l’ensemble des managers).

Ne perdons toutefois pas de vue que toutes ces mesures ne sont jamais que des ersatz.

Un peu à la mode des Chief Happiness Officer (CHO) auxquels on demande de prendre soin de la qualité de vie au travail des collaborateurs, mais sans modifier quoi que ce soit dans les fondamentaux de la qualité de vie au travail : le travail lui-même, son organisation, l’autonomie laissée au collaborateur, la prise en compte de ses talents et envies, la qualité du management au quotidien.

Alors, le CHO va d’emplâtre en emplâtre sur jambe de bois : organiser des festivités (repas de Noël, week-end d’intégration, ….), marquer les anniversaires, organiser des activités propices au bien-être (sport, yoga, méditation, massages du dos, etc.), améliorer le lieu ou le cadre de travail (plantes vertes, ergonomie, espaces détente…), proposer des services (conciergerie d’entreprise), être à l’écoute, etc…

Et demain ?

L’expérience de télétravail, le confinement laissera des traces. A la reprise, les salariés ne sont plus les mêmes qu’avant.

La souplesse d’organisation ne sera plus optionnelle et ne gommera en rien les autres attentes à l’égard du travail : sens, autonomie, création de lien et dynamique collective. Autant de défis à relever.

Il me semble illusoire de penser que de seules parades au mal-être y suffiront. Plus que des améliorations incrémentales, c’est d’innovation de rupture que l’on aura besoin.

Un peu de prospective et… un scénario de rupture ?

De mon expérience d’indépendante (« indépendante, mais pas seule » pour reprendre le sigle qu’a choisi Timothée Peyre pour nommer son activité d’indépendant, conseil en stratégie d’entreprise : IMPS) et quand je regarde la manière dont les choses évoluent et se font, je me hasarde à imaginer un scénario du futur.

A ce jour, en entreprise, l’on part d’une organisation, un découpage en fonctions à tenir puis l’on se met en quête de personnes pour « entrer dans les cases » définies par l’organisation.  Cet ordre est tenu pour acquis car il semble répondre à une logique implacable.

Mais on pourrait tout à fait en inverser les termes, l’ordre dans lequel les propositions s’enchaînent.

Naissance d'un autre monde

Dès lors, l’on partirait des personnes : leur système de valeurs, leurs compétences comportementales et leurs talents. Seraient proposés des « contrats de mission » pour mener à bien un projet. Les compétences à détenir et rôles à tenir y seraient précisés (au modèle du staffing des activités de conseil chez Vertone). Pour constituer l’équipe projet, les candidats intéressés par le projet et potentiellement retenus, se coopteraient, ce qui donnerait toute leur place aux affinités personnelles. On pourrait même imaginer que ce ne soit plus des personnes qui soient recrutées pour un projet, mais que postulent des équipes d’indépendants habitués à travailler ensemble et constituées pour répondre au besoin exprimé et pour le temps nécessaire à la réalisation du projet.

Dans de telles configurations, les liens, la vision commune, l’implication individuelle, la dynamique d’équipe n’ont plus besoin d’artifices pour naître. Toute leur place étant laissée aux affinités personnelles et interpersonnelles, c’est la personne, dans sa globalité, qui se trouve « naturellement » reconnue et respectée.

C’est… un autre monde.

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